Un anniversaire, un fête de Noël… les peintures d’Eileen Sealy semblent représenter des scènes du quotidien, presque banales -mais quelque chose cloche. Les couleurs sont inversées !
Dans sa série “Oof to Siegfried Layer”, la jeune artiste irlandaise questionne la lecture des images à travers des peintures à l’huile crées à partir de négatifs de photographies trouvés dans la rue à Karlsruhe (Allemagne), où figure une famille vivant dans la ville entre 1979 et 1993.
Troubler le spectateur
Les variables du négatif peuvent changer la façon dont le spectateur perçoit un élément qui lui est pourtant familier. Ces scènes en apparence joyeuses dont nous avons presque tous fait l’expérience et gardé des bons souvenirs (comme une fête d’anniversaire), peuvent mettre mal à l’aise ou sembler inquiétantes quand elles sont privées de leurs contextes et de leur palette de couleurs habituelle. “Comme une poupée en porcelaine peut paraitre plus effrayante que quelque chose de vraiment dangereux”.
L’œuvre d’Eileen Sealy prospère dans un environnement sans jugement, son atelier, où elle peut travailler librement en suivant ses intuitions. Elle y produit un travail très personnel selon ses recherches et concepts. Un travail, qui au delà d’un aspect esthétique très plaisant, nous interroge sur comment notre cerveau est formaté à lire une image.
“Dans mon travail j’essaye de créer des parallèles entre des personnes, endroits et situations qui semblent sans liens; mais évoquent un vague sentiment de familiarité”.
Heureux hasards
Son travail est souvent inspiré par des hasards ou des rencontres fortuites (comme trouver une boite de négatifs sur un trottoir peut ouvrir un large éventail de nouvelles possibilités). Les aléas de la vie sont une source inépuisable d’idées. “Une chose en entrainant une autre, mon travail peut m’emmener vers des directions que je n’avais pas anticipées”.
Dans d’autres travaux, Sealy joue avec les différentes perspectives offertes par la peinture. Testant l’acrylique, le crayon, l’autoportrait, le collage, l’écriture, différentes palettes de couleurs… elle expérimente et se découvre.
Respecter le travail de l’artiste
Dans sa série “Stain Remover”, l’artiste fait couler de la peinture à l’huile très épaisse (et de la farine) sur la toile à travers des sacs plastiques, perturbant la vision traditionnelle d’une œuvre d’art. En tant qu’étudiante en art, Eileen Sealy est très au courant que nombre de ses œuvres sont aujourd’hui stockées les unes sur les autres. Avec cette série, elle veut créer des œuvres que l’on ne peut manier qu’avec beaucoup de soin, qui demandent donc beaucoup de respect car elles ne peuvent pas être entreposées ou superposées sans être abimées ou détruites.
Ses titres originaux, parfois presque ironiques, composent avec les œuvres : l’art et l’artiste méritent d’être respectés peu importe s’il s’agit d’une œuvre sérieuse ou plus humoristique.
De la peinture à la pluridisciplinarité
Les intérêts et inspirations de l’artiste de 20 ans s’ouvrent à de nombreux sujets, dont certains ne sont pas réalisables à travers la peinture. En expérimentant différents médiums, comme la sculpture, le collage ou l’installation, elle évolue librement à travers les différents espaces et champs de possibilités. Donnant libre cours à son énergie créative, elle exploite pleinement le potentiel que lui offre tous ces matériaux. Dans ses carnets de brouillons, sa pratique en atelier et enfin le résultat final, son travail se meut et rejette l’image d’art statique souvent associé à la peinture.
Sealy voudrait découvrir de nouveaux matériaux pour le moins éloignés de son travail actuel et plutôt originaux comme la poterie, le filage à la main, et même le touffetage (oui, comme pour les tapis et la moquette !). “Mon rêve absolu serait d’avoir toutes les pièces de poteries de ma maison réalisées et peintes à la main par moi-même”. Le rêve d’un terrain d’entente entre l’art esthétique, pratique, et à utilisation “domestique” (comme décoration d’intérieur ou utilisable dans la vie de tous les jours).
J’adorerais expérimenter avec des médiums comme le touffetage. Je pense que cela peut également être un intermédiaire curieux, et qu’il peut être intéressant d’explorer la peinture à travers cette pratique.
Agrandir ses horizons
Son intérêt pour ces médiums, en apparence si éloignés, alimente fortement son attirance pour l’art de l’installation. Peut-être présente dans ses projets à venir ?
Dans un futur proche, Eileen Sealy va obtenir son diplôme au Collège National des Beaux-Arts et Design de Dublin. Elle compte poursuivre son travail de peinture tout en agrandissant ses horizons – en gardant le monde autours d’elle comme importante source d’inspiration.
Vous pouvez retrouver le travail d’Eileen Sealy sur son site et sur son Instagram.
Plus de peinture à l’huile sur Beware Magazine avec les corps étranges et oniriques de Walter Laguerre.