Par quel angle prendre l’œuvre d’Erik Thor Sandberg ? Par l’aspect purement horrifique et graphique ? Seulement, si dans ses toiles, l’obscurité émane de comportements proprement humains, ils ne constituent en aucun cas le seul thème aborder par l’artiste. On ne peut pas non plus le catégoriser comme un homme profondément nostalgique, car, s’il utilise bien la peinture à l’huile et des panneaux de bois pour ses créations, Sandberg n’hésite pas à les déconstruire pour ensuite les réarranger dans une disposition propice à la diffusion de son message.
Et si la clé se trouvait dans l’une de ses grandes influences, à savoir Francisco de Goya ? Le peintre espagnol disait, en effet, que “le sommeil de la raison engendre des monstres.” Erik Thor Sandberg dépeint avant tout l’altérité, ce qui l’amène à imaginer des visions, des silhouettes que nous allons interpréter comme monstrueuses. Non pas parce qu’elles seraient particulièrement sanglantes ou effrayantes, mais bien parce qu’elles sont différentes. Parce qu’elles ne rentrent pas dans les canons de notre réalité.
La monstruosité de l’Homme face à l’humanité des créatures
Erik Thor Sandberg a toujours déclaré son profond désintérêt pour “le fait de fendre la peau”. Si cela peut paraître paradoxal quand on observe le nombre de ses toiles qui illustrent une fêlure du corps humain, cette déclaration résume parfaitement l’état d’esprit du peintre américain. Ce qui intéresse réellement Sandberg n’est pas la chair, mais bien ce que cache l’enveloppe corporelle, ce que renferme la cage de l’âme. L’artiste explore ainsi les différentes facettes de l’Humanité et met en exergue ses nombreux travers. La toile intitulée “Trapping” est un bon exemple de ce qu’explore l’artiste, comme le rapport qu’entretient l’homme avec la nature ou, plus largement, avec ce qui diffère de lui.
Ce tableau, quand il est mis en parallèle avec d’autres de ses œuvres, permet aussi de mettre en lumière un aspect essentiel du travail d’Erik Thor Sandberg : son rapport aux créatures. Qu’elles soient fantastiques ou d’origines animales, elles tiennent un rôle prédominant dans l’art de Sandberg. Plus que de la simple figuration, elles sont le vecteur du propos et, surtout, elles incarnent régulièrement un motif de grâce, une bizarrerie innocente qui serait pervertie par l’Homme.
Un propos appuyé par cette esthétique emprise de surréalisme que met en scène parfaitement le peintre. Des arbres qui poussent dans le ventre d’humains, une femme qui chausse un lièvre, un oiseau qui s’échappe de la bouche de quelqu’un, etc.. Ce parti pris esthétique est tout sauf anodin, car, au-delà de la simple démonstration, il permet surtout à Erik Thor Sandberg de s’éloigner de l’imagerie codifiée de ses illustres aînés, pour qui la place accordée à ces créatures et animaux se cantonnaient à une signification claire et conforme aux récits religieux. On y sent toute l’influence de Goya qui, déjà à son époque, n’hésitait pas à nous plonger dans des visions dantesques, hallucinatoires et surréalistes. Sandberg explique peindre “à cheval entre le réalisme magique et le surréalisme.” Pourtant, s’il y a bien une chose de sûr à propos de son travail, c’est que malgré l’aspect fantastique, malgré une technique et une esthétique dîtes classique, il arrive magnifiquement à capter toutes les nuances de l’esprit humain, et ce, qu’il soit “bon, mauvais, ou laid”.
Découvrez le reste de son travail sur son site et arpentez les rues de Big Apple dans la série de l’artiste français Thomas Blanchard et intitulée One Minute in New York.